Ce livre comprend une histoire courte entrelardée de nouvelles qui ont toutes pour sujet le métro, ses habitants, ses passagers, ses mythes, etc.
L’histoire qui apparaît en pointillés est ce qu’il y a de plus faible dans ce livre, du fait d’un personnage de marseillais caricatural et pas toujours crédible et d’un monde de la cloche, mieux décrit par exemple dans « Noir Rivage » de Demure, mais le final est flou et touchant, d’une précision désespérée.
Pour les nouvelles, Stéphanie Estournet varie les temps, les personnages, les points de vue, certaines sont rapides avec une chute surprenante, d’autres sont des tranches de vie qui pourraient continuer telles quelles après la nouvelle, certaines histoires rebondissent d’une nouvelle à l’autre. On sent une grande maîtrise, une grande habilité, l’auteur nous montre l’étendue de sa palette. Certaines nouvelles sont percutantes (par exemple celle sur les dealers qui finit par « Merde, Martial, c’était mon meilleur pote. ») d’autres plus tendres, toutes savent éveiller un intérêt. Peut-être veut-elle trop nous montrer l’étendue de son talent en changeant sans cesse de forme, de dispositif, mais cette multiplication des points donne une vue globale et un effet de froide objectivité.
La lecture de ces nouvelles à la suite crée un malaise dû à la vision d’un monde où la peur et la violence sont omniprésentes, une vision angoissante du monde souterrain, avec des réminiscences fréquentes des guerres coloniales, que l’auteur évoque plusieurs fois, peut-être en échos d’une haine de l’autre, d’une violence qui perdure.
L’ambiance du métro, de la promiscuité est très bien rendue dans ce livre claustrophobe et paranoïaque.
Un recueil de nouvelles ludique et tendu sur les dessous de notre société déshumanisante.
Mythologies Souterraines de Stéphanie Estournet, Série Noire, Gallimard, 2003
Mythologies Souterraines de Stéphanie Estournet
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